Existence de Dieu

Prouver Dieu par la raison – Trouver la vraie religion

La vraie religion 2/3 : les préjugés

Préjugé : Le facile et le difficile

Préjugé courant : La vraie religion, si elle existe, est difficile à discerner. Tellement difficile qu’il est sage de renoncer à trancher. Restons dans le doute!

Pour appuyer ce préjugé, on ajoute que la science, l’intelligence et l’honnêteté se rencontrent dans tous les cultes. Si les grands esprits n’ont jamais pu se mettre d’accord sur la vraie religion, n’est-ce pas la preuve absolue qu’elle est très difficile à discerner ?

En réalité, il y a difficulté et difficulté :

— Pour le banquier Dutronsec, il est très difficile de faire une aumône de 20 euros. Il est pourtant richissime et il a le billet sous la main. L’action est difficile non pas en soi, mais à cause d’un vice très particulier : l’avarice.

— Madame Lapeureuse pourrait très facilement, si elle le voulait, écraser l’araignée trouvée dans son évier, plutôt qu’appeler son mari à l’aide. Sa difficulté est psychologique, due à une passion non maîtrisée : la peur.

— S’il se comportait raisonnablement, Superbe admettrait que Victor est plus fort que lui au jeu d’échecs, plutôt que de l’accuser violemment de tricherie à la fin de chaque partie. Seul son orgueil lui rend subjectivement difficile un constat objectivement évident.

­— De même, madame Mèrepoule  n’aurait absolument aucune difficulté à voir aussi bien que le reste du monde les gros défauts de Matthieu, si celui-ci ne se trouvait pas être son fils.

Des actions ou des constats qui sont en soi faciles – si on  veut vraiment les faire – peuvent être, auparavant, difficiles à vouloir.

Il en va de même de la religion : de soi, la vraie religion est facile à discerner, mais à condition qu’on le veuille vraiment.  Là est la vraie difficulté. Il n’est pas toujours facile de vouloir vraiment trouver la vérité.

Les obstacles à la vérité

On peut distinguer deux sortes d’obstacles :

—> la pression sociale (obstacle extérieur)

—> les passions déraisonnables (obstacle intérieur).

Obstacle extérieur : la pression sociale

Premier obstacle sur le chemin de la vérité : la pression sociale.

L’homme renonce souvent à penser par lui-même. Il suit le courant général et même quand il pourrait très facilement se rendre compte que les autres ont tort, il préfère les suivre plutôt que de s’y opposer. C’est ce que montre le célèbre conte d’Andersen “ Les habits neufs de l’Empereur” dont le constat est confirmé par plusieurs expériences modernes  de psychologie sociale (notamment celles de Asch, Milgram et Sherif).

Ce constat  est à la fois inquiétant et rassurant. Inquiétant car les pouvoirs politiques et médiatiques ont aujourd’hui les moyens administratifs et techniques de créer artificiellement une fausse unanimité, de type totalitaire, qui exerce sur chaque individu une énorme pression morale.

 

Et cependant – c’est l’aspect rassurant – cette pression qui empêche le bon sens de s’exprimer (personne n’ose crier : Le roi est nu) ou même de s’exercer (personne n’ose s’avouer à lui-même qu’il voit le roi nu), ne peut pas supprimer radicalement ce bon sens. Si quelqu’un veut s’affranchir de la tyrannie de l’opinion et voir la réalité telle qu’elle est, il peut facilement constater que, de fait, le roi est nu. C’est en ce sens que reste facile à discerner la vraie religion.  La seule condition est de le vouloir vraiment.

Expériences de Asch, Milgram et Sherif.

Un sujet est intégré dans groupe dont tous les autres membres sont de mèche pour affirmer une erreur ou prôner un comportement aberrant. Le sujet testé ignore la cause de cette unanimité. Les résultats de l’expérience montrent que, dans la majorité des cas,  il se rallie à l’avis des autres, même s’il a sous les yeux la preuve qu’il s’agit d’une erreur, et même si, laissé seul, il trouverait immédiatement la bonne réponse.

Expériences de S.E. Asch, Stanley Milgram, et M. Sherif. Voir, par exemple, Pascal BernardinMachiavel pédagogue, Drap, éd. N.D. des Grâces, 1995, p. 14-18. ]

Obstacle intérieur : les passions déraisonnables

A l’obstacle extérieur de la pression sociale peut s’ajouter un obstacle intérieur, qui empêche, lui aussi, de vouloir vraiment connaître la vérité : c’est la passion, qui empêche la raison de fonctionner normalement.

— Tel vieillard refuse systématiquement la religion, au motif qu’il a rencontré un prêtre qui avait tel ou tel défaut. Attitude psychologiquement compréhensible, mais fondamentalement irrationnelle, car la valeur de la religion est indépendante des défauts ou des qualités humaines de ce prêtre.  Vous aurez beau le lui dire, il ne vous écoutera pas. La passion est la plus forte.

— Tel autre est passionné de tranquillité. S’il est né dans la vraie religion, tant mieux pour lui. Sinon, tant pis, car il ne fera pas le moindre effort pour aller voir ailleurs. Rompre avec son milieu, sa famille, ses habitudes pour une question de vérité religieuse ne lui vient même pas à l’esprit. (Les fauteuils sont-ils donc tellement meilleurs dans la vraie religion ?)

— Tel autre est si attaché à sa façon de vivre, de gagner de l’argent (pas très honnêtement) ou de se livrer aux plaisirs, qu’il ne peut envisager d’y renoncer. Il ne veut pas admettre une religion qui impose des contraintes morales. Là encore c’est la passion qui détourne de la vérité.

— Le révolté par principe est à peu près dans le même cas. Il a souffert, il souffre et il bute sur le mystère de la souffrance. Mais au lieu de rechercher la lumière qui permettrait de comprendre et de dépasser son épreuve, il la refuse par principe, parce que la lumière risquerait de justifier cette souffrance contre laquelle il a dressé l’étendard de la révolte. Il peut multiplier les arguments rationnels, en réalité il y a toujours, en arrière-fond, un refus volontaire : ce malheureux s’enferme sur lui-même au lieu de s’ouvrir à la vérité.

— Il y a enfin une passion plus élevée : la fidélité à la religion de sa famille (ou de son pays). Il est naturel d’être attaché à la religion de ses pères. Un hérétique à qui saint Pie X demandait pourquoi il était protestant répondit que c’était la religion héritée de ses parents. C’est la meilleure raison que vous puissiez donner, convint le pape. Cette piété filiale est noble. Cependant, elle doit céder devant la vérité. S’il n’y a pas de religion révélée par Dieu, si les différents cultes ne sont tous que des coutumes humaines, il est normal que chacun honore l’Être divin selon les traditions de ses ancêtres. Mais si Dieu s’est révélé, la vérité doit primer. Il faut préférer la religion de notre Père céleste à celle de nos parents de la terre.

Malheureusement, le chauvinisme peut étouffer tout souci de discerner la vraie religion. Au lieu d’ouvrir l’esprit, la passion enferme dans les préjugés nationaux ou raciaux. On est fidèle de sa religion à peu près comme on est supporter de l’équipe nationale de football. On y met beaucoup d’ardeur et de conviction, mais l’intelligence et l’élévation de l’âme vers Dieu n’ont plus grand-chose à y voir. C’est ce qu’on appelle communément le fanatisme, qui peut souiller même les meilleures causes.

Cette identification entre religion et communauté politique – ou familiale – est particulièrement forte dans l’islam, qui ne distingue pas le spirituel du temporel. Elle renforce la pression sociale (obstacle extérieur), qui rend très difficile la conversion des musulmans. Joseph Fadelle en a fait l’expérience. [Joseph Fadelle, Le Prix à payer, Paris, L’Œuvre, 2010.] Ce jeune Irakien, né dans une grande famille chiite, avait toujours considéré le fait d’être musulman comme totalement naturel, jusqu’au jour où il rencontra un chrétien pendant son service militaire.

Voulant discuter religion avec lui, il reçut une réponse inattendue :

“Je vais d’abord te poser une question, une seule, et tu vas me répondre franchement. […] As-tu lu le Coran ?

– Bien sûr, bondis-je, tu me prends pour un mécréant, un mauvais musulman ?

– Mais est-ce que l’as vraiment lu ? […] Tu as compris le sens de chaque mot, de chaque verset ? […] Si tu veux que je t’apporte l’Évangile, c’est d’accord, mais je mets quand même une petite condition : tu vas d’abord relire le Coran en essayant vraiment d’en déchiffrer le sens avec ton intelligence ; et sois honnête avec toi-même, ne triche pas”

[ Joseph Fadelle, Le Prix à payer, p. 24-25.]…

Aucune autre argumentation de la part du chrétien. Il n’a pas le droit d’en dire plus (toute critique du Coran est passible de mort, en pays musulman). Mais, de fait, il n’a pas besoin d’en dire plus. Et le résultat de son conseil est surprenant. Il suffit au jeune chiite de laisser honnêtement fonctionner sa raison – jusque là verrouillée par le conformisme social. Aussitôt, le Coran (qu’il avait pourtant lu et relu de nombreuses fois, et envers lequel il a encore un préjugé favorable) lui apparaît sous un autre jour. Les autorités religieuses qu’il appelle à l’aide pour soutenir sa foi musulmane chancelante ne lui apportent aucun secours. Il voit tout à coup, de façon aveuglante, que le Coran ne peut venir de Dieu. Libérée, la raison fait son œuvre avec une facilité déconcertante. Mais cette liberté a un prix moral : une grande simplicité de cœur – qui, dans un premier temps, rend Joseph Fadelle presque inconscient des dangers encourus. Puis un courage héroïque qui lui fera braver la mort.

Une fois les préjugés écartés, il reste à prier, pour demander à Dieu son aide et sa lumière car voir qu’une religion est vraie est une chose, y adhérer pleinement en est une autre : ce point est traité dans la 3e partie